La sculpture de Reinhoud, c’est un état de roman. Elle reflète
le monde où l’on vit, sa dureté, sa beauté, sa dignité, mais aussi sa
fêlure héréditaire.
Ses sculptures s’accomodent des circonstances, et sont là, personnages
sur lesquels s’appuyer.
L’art de Reinhoud est entier. Chaque sculpture est une totalité. Et
chaque sculpture répond à chaque sculpture. Il n’y a pas un seul personnage
de Reinhoud qui n’ait le droit de parler aux autres personnages
de reinhoud.
Leurs faits et gestes ne nous sautent aux yeux que parce qu’ils reflètent
les nôtres.
C’est notre propre histoire qui s’ébroue sous nos yeux.
Les personnages de reinhoud n’émanent pas des gouffres de l’inconscient
: ils ne sont pas les désirs improbables du sexe, les coursiers
de la peur, les cris, les vertiges de vivre. Ils nous arrivent tout droit
d’Homère. ils possèdent une bonne assise terrienne, ils habitent
leurs corps.
Dans la sculpture qui en avait perdu l’habitude, Reinhoud réintègre
le rire comme moyen de communication. Des êtresmasqués multiplient
la question d’Hamlet : ëtre ou ne pas êtredevient être plusieurs ou
ne pas être.
Ne pas donner forme aux sensations, c’est presque ne pas sentir,
disait Dürer. il avait la conviction qu’il faut faire coincider le plus
possible le travail du sculpteur avec le moment exact d’inspiration,
autrement dit, de son émotion.
Cela n’intéresserait pas du tout Reinhoud de parcourir l’itinéraire
d’une sculpture. Quelque soit l’état d’esprit dans lequel il était
quand il commençait une sculpture, cet état d’esprit disparaissait. Il
n’y avait plus que la matière et lui.
On perd à peu près tout de sa vie passée si l’on ne crée pas une mémoire,
d’une façon ou d’une autre. La sculpture de reinhoud est son
empreinte.
Nicole d'Haese
© Galerie Laurentin, Paris, Bruxelles